En voilà un beau mensonge ! Le lobby du plastique tente de nous faire croire que seulement 7 % des sacs de magasinage en plastique sont jetés à Montréal : « ZÉRO DÉCHET – OU PRESQUE », proclame-t-il fièrement. Quelle exagération !
Cette affirmation est carrément trompeuse et malhonnête. Le lobby du plastique obtient un total impressionnant de 93 % en combinant des taux estimatifs de réutilisation et de recyclage. Le problème, c’est que près des deux tiers de ce total correspondent à des sacs réutilisés pour jeter des ordures ou des excréments d’animaux domestiques. Ce sont des sacs qui, vous l\’avez compris, finiront bientôt au dépotoir ou traîneront dans les rues.
Le fait d’affirmer que « seulement 7 % des sacs (à Montréal) sont jetés » et que « la gestion des sacs usagés permet d’atteindre presque zéro déchet », lorsqu’en fait près de 70 % de ces sacs aboutissent au site d’enfouissement, constitue un mensonge éhonté. Cette affirmation déplace vers les sacs à ordures le fardeau environnemental lié aux sacs de magasinage.
Il s’agit aussi d’un calcul erroné. Pensez à toutes les vieilles boîtes de carton, pleines d’objets qu’elles ne contenaient pas au départ, qui se trouvent dans votre garage ou au grenier. Allons-nous faire comme les gens du plastique et les compter comme des boîtes réutilisées afin de pouvoir dire qu’on n’envoie presque pas de boîtes au dépotoir ? En fait, si nous faisions comme les gens du plastique font pour les sacs et que nous ajoutions les caisses en carton ondulé réutilisées aux caisses recyclées par les ménages ontariens (98 %), nous dépasserions facilement 100 % ! Oui monsieur, nous sommes capables de faire encore mieux que zéro déchet !
Le taux de recyclage peut aussi être mis en doute. Il s’agit du pourcentage des sacs de plastique recueillis plutôt que du pourcentage des sacs recyclés. Pour avoir une idée des vrais chiffres, demandez à un opérateur d’installation de récupération de matériaux combien de sacs de plastique sont enlevés de la machinerie et envoyés au dépotoir, ou à une usine de recyclage de papier quelle quantité de films de plastique se retrouve parmi les résidus qu’elle doit jeter à ses frais.
Bien entendu, à mesure que des villes bannissent les sacs de plastique, l’industrie du plastique ne peut résister à l’envie de s’attaquer aux solutions de remplacement comme les sacs réutilisables et les sacs de papier. C’est ce qu’elle fait depuis un bon bout de temps, principalement par l’intermédiaire d’un site Web ironiquement appelé All About Bags (Tout sur les sacs). Eh bien, l’industrie du plastique ne dit pas absolument tout sur les sacs. Dans sa section spéciale les déchets, le site néglige de mentionner que des sacs finissent par se retrouver dans nos rivières, lacs et océans.
Le site donne aussi une impression complètement fausse de la production et de la performance environnementale des sacs de papier au Canada. Nous avons déjà souligné par le passé un vilain mensonge et plusieurs erreurs factuelles sur ce site. La comparaison qu’on tente de faire avec la gestion des déchets comporte aussi de sérieuses lacunes. Pour commencer, on peut généralement transporter plus de marchandises dans un sac en papier que dans un sac de plastique (c’est un fait reconnu par les experts du cycle de vie). On ne peut donc pas effectuer des calculs en se basant sur l’hypothèse qu’un sac en papier remplace un seul sac de plastique, car il en remplace plus d’un. Par voie de conséquence, cela change les calculs d’impact des gaz à effet de serre.
On ne peut pas non plus présumer que tous les sacs de plastique bannis seront remplacés par des sacs de papier. En réalité, le bannissement des sacs de plastique semble réduire considérablement l’utilisation des sacs de plastique (réduction directe) et augmenter de manière importante celle des sacs réutilisables. On ne voit pas apparaître de nouvelles usines de sacs de papier un peu partout !
Dans le même ordre d’idées, le coût net du recyclage des films de plastique est six fois plus élevé que celui du recyclage des sacs de papier dans une balle de carton ondulé. Cela signifie qu’on a omis de tenir compte d’économies importantes (dépenses évitées) liées au remplacement des sacs de plastique.
L’industrie du plastique adore aussi mettre de l’avant des soi-disant analyses du cycle de vie (ACV). Comme nous l’avons déjà fait remarquer, la plupart de ces études sont vieilles, leur qualité et leur pertinence sont variables et, pire encore, elles ne comportent pas véritablement de données sur la production des sacs de plastique et de papier au Canada. Des hypothèses et des conclusions basées sur des études qui portaient sur la fabrication des sacs de plastique en France, en Espagne, en Italie, en Turquie, en Malaisie et en Chine il y a plus de 20 ans ne disent pas grand-chose sur la situation actuelle au Canada !
La grande quantité de résidus de moulins à scie et d’énergie renouvelable (biomasse neutre en carbone) qui est utilisée dans la fabrication des sacs au Canada n’est pas prise en considération dans les analyses du cycle de vie citées par les gens du plastique. Il est donc faux de prétendre que les coûts de la gestion des déchets solides à Montréal et ailleurs augmenteront en flèche, tout comme les émissions de gaz à effet de serre, si les sacs de plastique sont remplacés par des sacs de papier.
Tant que les ACV ne tiendront pas compte de ces facteurs clés dans la production de papier (l’utilisation de résidus de moulins à scie et d’énergie renouvelable) et de l’impact des déchets marins, nous allons nous retenir d’affirmer que les sacs de papier sont « plus écologiques » (de toute façon, le Bureau de la concurrence a émis une mise en garde contre l’utilisation de cette expression). Cependant, nous allons continuer à signaler les fausses allégations, les faits inexacts et les mensonges éhontés proférés par nos concurrents qui ne sont pas très à cheval sur les principes.